Entendu par les juges ce lundi, l’ancien gouverneur du Katanga est accusé de recrutement de mercenaires étrangers. « Un faux procès » du pouvoir, selon lui.

Libre, c’est un soulagement pour ses proches. Moïse Katumbi est ressorti libre du palais de justice de Lubumbashi ce lundi en fin de journée après plusieurs heures d’audition devant les juges. Des centaines de partisans ont tenu a l’accompagné en milieu de matinée pour se rendre à la convocation du procureur. Ses supporters ont attendu toute  la journée, craignant que la justice délocalise l’affaire à Kinshasa et interpelle l’ancien gouverneur. Les réseaux sociaux bruissaient de la présence d’un avion qui attendait Katumbi sur le tarmac de l’aéroport pour le transférer dans la capitale congolaise… mais il n’en a rien été. Moïse Katumbi a pu regagner son domicile de Lubumbashi en fin d’après-midi. Mais sur le plan judiciaire, ses ennuis ne font que commencer avec la justice congolaise. L’audition de lundi a simplement été suspendue et reportée au mercredi 11 mai.


27 collaborateurs de Katumbi arrêtés
Rival sérieux du président Joseph Kabila qui cherche à se maintenir au pouvoir au-delà des délais constitutionnels, Moïse Katumbi est entré dans le viseur du pouvoir fin 2015, alors qu’il quittait bruyamment la majorité présidentielle. Depuis, l’ancien gouverneur est la cible d’intimidations des autorités congolaises. Ce lundi Human Rigths Watch (HRW) a comptabilisé que « pas moins de 27 collaborateurs » de Katumbi ont été arrêtés entre le 22 avril et le 7 mais 2016. Selon Daniel Bekele, le responsable d’HRW pour l’Afrique, «  Les arrestations et les agressions commises à Lubumbashi semblent consister en autre chose que les habituels cas de harcèlement policier, mais plutôt en des actes visant précisément un prétendant à la présidence et ses proches partisans ».
Manifestation interdite, permanences politiques vandalisées
L’ONG rappelle la longue litanie d’opérations d’intimidation sur l’ancien gouverneur et ses proches. Notamment autour de la date du 24 avril, journée de manifestation de l’opposition dans l’ensemble du pays. « La police a tiré des cartouches de gaz lacrymogène sur Katumbi et une grande foule de manifestants pacifiques à Lubumbashi, afin d’empêcher le déroulement d’un rassemblement d’opposition lors duquel Katumbi devait prendre la parole, explique HRW. Les permanences de deux partis d’opposition à Lubumbashi ont été récemment vandalisées. » À Kinshasa, Goma et Bukavu, ces manifestations se sont déroulées dans le calme.
Arrestations en série
À Lubumbashi, dans les jours précédant la manifestation du 24 avril, les forces de sécurité ont arrêté l’ancien directeur de cabinet de Katumbi; 6 employés de Katumbi; 2 fils d’un dirigeant du G7, Pierre Lumbi, et 3 de leurs employés; au moins 10 membres de partis d’opposition et d’autres qui étaient sortis pour participer au meeting public planifié ; un des anciens gardes de sécurité de Katumbi ; ainsi que 4 activistes des droits humains. Seize de ces personnes ont depuis lors été remises en liberté, mais 11 autres sont toujours en détention, souligne Human Rigths Watch.
Un concurrent sérieux
Alors que l’incertitude plane sur la tenue des prochaines élections, l’acharnement policier et judiciaire contre Katumbi cherche assurément à écarter un concurrent sérieux en cas d’élection présidentielle. L’affaire des mercenaires pourrait avoir été montée pour rendre inéligible le candidat Katumbi. L’ex-Katanga reste le fief électoral du camp Kabila. Et Katumbi dérange. Il est célèbre, riche et devient de plus en plus populaire dans la province et le pays. Il connait également parfaitement le fonctionnement du système Kabila dans la riche province minière, pour en avoir fait partie pendant de nombreuses années. Des atouts qui en font le rival le plus populaire face au camp présidentiel. « Isolé » et « neutraliser » le candidat Katumbi semble être devenu la priorité du pouvoir.
Déjà en campagne
Un acharnement qui, pour le moment, ne fait que renforcer le candidat Katumbi. Sur son compte Twitter lundi soir, l’ancien gouverneur très offensif : « Au-delà de mon procès politique, mes pensées vont aux populations de Beni victimes d’incessants massacres depuis trop longtemps – voir notre article. Notre gouvernement doit maintenant agir : accroissement des efforts militaires, policiers, juridiques. Au lieu des faux procès à L’shi. » conclut l’ancien gouverneur… déjà en campagne.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia

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